samedi 8 décembre 2007

La disparition de Karlheinz Stockhausen

Karlheinz Stockhausen
Je viens d’apprendre ce matin par la radio que le compositeur allemand Karlheim Stockhausen s'est éteint mercredi 5 décembre, à son domicile de Kürten en Allemagne. Il était âgé de 79 ans. Pour la plupart d’entre vous cela n’évoque certainement pas grand chose, néanmoins, il est l’un des pionniers, l’un des grands de la musique électroacoustique, cette entité protéiforme regroupant la musique concrète, acousmatique, expérimentale et autres variations dont vous pouvez lire les définitions ici.


Karlheim Stockhausen a contribué à faire évoluer l'acception de la musique, l'étendant au son, et à la recomposition, etablissant la musique non plus comme un processus de composition et d'execution musicale seulement, mais également de recomposition, faisant de la musique et du son des objets plastiques. Ces objet plastiques, on peut les manipuler, le retravailler, le jetter à la poubelle, les en sortir, les froisser etc...

"Tout son peut devenir de la musique s'il est lié à d'autres sons (...) Chaque sonorité est précieuse et peu devenir belle à condition d'être à sa juste place, au bon moment"

C’est cette nouvelle vision de la musique, permise par le progrès technologique qui a amené des genres comme l’électro ou la techno, mais qui a également bouleversé la musique dans son ensemble en introduisant l’idée que la musique est créée avant, pendant, et après, concept exploité dans la plupart des productions musicales actuelles. En effet, il y a la composition, acte intellectuel et/ou spirituel, puis la création artistique, et enfin, grâce à l’informatique, le retraitement du son, qui permet la recomposition des sons, totalement ou partiellement, ainsi que l’adjonction de sons électroniques, etc.

Karlheinz Stockhausen

Je crois à la découverte perpétuelle des formes musicales, des vibrations sonores et des ambiances qui permettront à l’homme de s’émerveiller à nouveau, de saisir le miracle qui lui donne raison de continuer à vivre. Et quand je vois un nouveau synthétiseur, un nouveau computer, je ne comprends pas ces techniciens qui se satisfont de résoudre avec lui de tout petits problèmes, alors qu’il y a des milliers de possibilités qui nous permettraient d’avancer tellement plus vite.
(Karlheinz Stockhausen, interview au journal Le Monde, 1977)

Karlheinz Stockhausen est né le 22 août 1928 à Mördath, près de Cologne. Il étudie la musique à Cologne, de 1947 à 1951 – mais aussi la philologie, la philosophie, et la musicologie. Il suit également les cours d’été à Darmstadt et découvre les musiques de Pierre Boulez et d’Olivier Messiaen, qui ont sur lui une influence déterminante.

Il commence à écrire des pièces d’inspiration sérielle (Kreuzspiel, 1951; Formel; Spiel). Il vient à Paris en 1952 pour suivre les cours d’Olivier Messiaen. Il y rencontre également Darius Milhaud, Pierre Schaeffer et réalise quelques études au GRMC.

Stockhausen participe en 1951 à la création du studio de la Westdeutscher Rundfunk de Cologne (avec Herbert Eimert). Il en devient bientôt collaborateur permanent, et en sera par la suite directeur artistique entre 1963 et 1973. Il y compose en 1953 sa première pièce électronique : Studie I, pour un à six sons sinusoïdaux. Il dépassera ce stade expérimental avec la composition, trois ans plus tard, en 1956, du Chant des Adolescents dans la fournaise, (Gesang der Jünglinge).

Dès 1953, il enseigne à Darmstadt. Entre 1954 et 1960, il compose une série d’œuvres décisives : les Klavierstücke V à X; Zeitmasse; Klavierstücke XI, une des premières œuvres aléatoires; Gruppen; Carré; Zyklus; Kontakte, qui mêle les sons traditionnels instrumentaux et les sons électroniques. Toutes ces œuvres ayant pour principe “ l’unicité du matériau et de la forme ”.

Au début des années soixante, il présente dans Momente le concept de la forme momentanée qui est l’aboutissement “ d’une volonté de composer des états et des processus à l’intérieur desquels chaque moment constitue une entité personnelle, centrée sur elle même et pouvant se maintenir par elle même, mais qui se réfère, en tant que particularité, à son contexte et à la totalité de l’œuvre ”. Suivent des œuvres comme : Mikrophonie I et II; Mixtur; Telemusik (1966, qui mêle des fragments de musiques traditionnelles du monde entier à un flot de sons électroniques); Hymnen (1968, pour bande et instruments, mélangeant, étirant et fondant en un long continuum les hymnes nationaux des pays du monde entier); Prozession. Toutes ces œuvres témoignent de recherches sur la transformation instantanée des phénomènes sonores (temps réel), et sur celle d’une “ musique électronique vivante ”.

À partir de 1963, Stockhausen enseigne à Cologne, Philadelphie, et en Californie. Il donne des concerts dans le monde entier dont il règle tous les détails, et qui deviennent de véritables spectacles, voire de véritables rituels.

Après Stimmung, Mantra, et Sirius, (1977), son travail, qui continue de faire une très large place à la musique électroacoustique et mixte, est entièrement consacré à l’achèvement du cycle Licht (Lumière), qui doit constituer le point culminant de son œuvre. Le cycle sera constitué de sept opéras, composés chacun sur l’un des jours de la semaine. Cet ensemble “ cosmogonique ” devra durer près de 35 heures. Stockhausen a déjà composé cinq des sept parties, exécutables séparément. De l’une d’entre elles (Mardi de Lumière), fait partie Oktophonie, musique électronique qui fut créée en 1994 à la Triennale de Cologne.

La musique électroacoustique (INA-GRM / Editions Hyptique, 2000)
Alors après, la musique de Karlheim Stockhausen, on aime ou on n’aime pas, c’est un peu particulier, et personnellement je préfère les œuvres de Luciano Berio, Iannis Xenakis, Jean-Claude Risset, ou même de Pierre Schaeffer, le père du mouvement. Néanmoins, c'est un grand nom de la musique.

Karlheinz Stockhausen
Je vous invite également a lire cet article :
La disparition de Karlheinz Stockhausen
LE MONDE | 08.12.07

© Le Monde.fr

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